PRÉSENCE DE LUMIÈRES

AGRICULTURE URBAINE

Centre d’excellence en agriculture urbaine et en phytoremédiation / Parc Nature MHM
Note. J’ai rédigé ce texte dans le cadre du 
Collectif citoyen Mobilisation 6600
Proposition
Le collectif citoyen Mobilisation 6600 propose d’implanter à l’orée du Parc Nature MHM un Centre d’excellence en agriculture urbaine et en phytoremédiation.

Justificatif
Les citoyennes et citoyens du collectif Mobilisation 6600, et de très nombreux autres résidantes et résidants de l’Est de Montréal, militent pour implanter un Parc nature sur le terrain regroupant les boisés Steinberg et Vimont, la friche de Ray-Mont Logistique et des voies du CN. [1] La seule avenue possible pour atteindre cet objectif est l’expropriation des terrains concernés. Est-ce que la création d’un parc municipal serait un motif suffisant pour justifier une expropriation ? D’un point de vue juridique, la réponse est oui ; d’un point de vue politique, nous souhaitons qu’elle le soit aussi mais on pourrait soulever un doute. Dans ce contexte, comme justificatif additionnel à l’expropriation, nous proposons d’implanter au sein du Parc nature un Centre d’excellence en agriculture urbaine et en phytoremédiation.

Vision
Le projet du Parc Nature MHM / Centre d’excellence en agriculture urbaine et en phytoremédiation s’inscrit dans la vision stimulante des Amis du Parc Nature ; c’est la proposition de créer un chapelet de parcs naturels, incluant des milieux humides, traversant l’île du sud au nord, de la rue Notre-Dame au boulevard Gouin (voir la présentation de François Plourde (Renard Frak) et Julien Bourbeau, intitulée Sur le bord du Ruisseau de la Grande-Prairie, à l’Office de consultation publique de Montréal sur l’aménagement du secteur l’Assomption-Sud/Longue-Pointe). Il s’appuie aussi sur les recommandations de Patricia Clermont et François Gagnon dans leur mémoire déposé à la même consultation publique. Ils respectent enfin les recommandations de Conseil régional de l’environnement de Montréal à propos de la mise en valeur du même secteur. Ces recommandations se fondent sur une adhésion quasi-unanime des résidant.e.s de l’est de Montréal.

L’agriculture urbaine
L’agriculture urbaine est la production de denrées comestibles en ville, à proximité des population, afin de réduire l’empreinte carbone de cette production. Elle se pratique en pleine terre ou sur les toitures des bâtiments, à l’air libre ou en serres, selon les méthodes traditionnelles ou l’hydroponie. Elle produit principalement des fruits et des légumes, mais aussi des fines herbes, des épices et des champignons. Elle comprend des productions sur une grande échelle, commerciales ou collectives, de même que des micro-productions dans des serres ou des jardins communautaires. C’est par définition une pratique horticole saine, non polluante et non perturbatrice des milieux résidentiels qu’elle côtoie.
L’agriculture urbaine est complémentaire à l’agriculture rurale de proximité.

La phytoremédiation
La phytoremédiation est la décontamination des sols et l’épuration des eaux usées par l’utilisation de plantes vasculaires, d’algues ou de champignons ; ces plantes absorbent et éliminent les contaminants.
Le terme phytoremédiation provient du grec ‘phyton’ qui signifie ‘plante’, et du latin ‘remedium’, c’est-à-dire ‘rétablissement de l’équilibre ou remédiation’. La phytore­médiation n’est pas un concept nouveau ; il y a trois mille ans les hommes utilisaient déjà les capacités épuratoires de certaines plantes pour le traitement de l’eau. Depuis une cin­quantaine d’années, cette pratique a trouvé un regain d’intérêt en particulier pour l’élimination de pesticides incrustés dans le sol.
La phytoremédiation repose sur les interactions entre les plantes, le sol et les microorganismes. Le sol est une matrice complexe servant de support au développement des plantes et des micro-organismes qui se nourrissent des composés organiques et inorganiques qui s’y trouvent. Les plantes absorbent le contaminant pour le métaboliser, le stocker ou le réduire.
Cette technique pourra être utilisée pour décontaminer le sol du parc nature. Elle a déjà fait ses preuves pour décontaminer par un couvert floral les friches industrielles, polluées par des métaux, des pesticides, des solvants, du pétrole et ses dérivés, et des contaminants divers. Telle est la situation dans le sol du secteur Assomption-Sud

Nécessité
Implanter l’agriculture urbaine et les techniques de phytoremédiation sur une grande échelle est une nécessité de plus en plus pressante. Le climat se dérègle à un rythme affolant, partout, on déplore des sécheresses, des dômes de chaleur, des feux de forêt, des inondations … Un peu partout aussi, on déplore un sol est contaminé par cent cinquante années d’activités industrielles lourdes. Il faut stopper cette tendance suicidaire et agir en conformité avec les Accords du COP21 (Paris 2015), c’est-à-dire contenir le réchauffement climatique sous 2oC et s’affranchir des énergies fossiles.
L’un des moyens pour sauver notre monde est d’implanter une agriculture urbaine de grande qualité. Les urbains doivent se nourrir en produisant leurs denrées comestibles le plus près possible de chez eux. Cet impératif signifie que toutes les villes du monde doivent développer leur agriculture locale afin d’éliminer les transports sur de longues distances et les transbordements polluants qui laissent une forte empreinte carbone et contribuent à dérégler le climat.
Déjà, Montréal adhère à ce mouvement planétaire. Mais son effort est clairsemé et fragmenté, se résume à des potagers communautaires, à quelques initiatives citoyennes, à de rares serres industrielles sur le toit de grandes surfaces [2] et à des programmes scolaires. Il est nécessaire d’aller beaucoup plus loin, de développer un vaste mouvement entrepre­neurial pour implanter partout sur l’île de Montréal, sur les toitures et sur les terrains vagues, des lieux de production maraichère. [3]  Le réseau montréalais de jardins communautaires constitue l’embryon d’une agriculture urbaine. Mais si l’on veut pourvoir en fruits et légumes frais, en toutes saisons, la totalité de la population montréalaise, il faut faire beaucoup plus que les jardins communautaires qui ne sont cultivés que l’été. Il faut bien sûr continuer d’assurer leur croissance mais, en plus, il faut développer l’expertise scientifique, agricole, industrielle et commerciale de l’agriculture urbaine. Il faut que l’agriculture urbaine se hisse au niveau, par exemple, de l’aéronautique, même dynamisme, même puissance d’organisation et même reconnais­sance sociale et politique. Il faut accueillir la participation du secteur privé dans l’agriculture urbaine mais en même temps inscrire l’activité dans un encadrement public qui assurera la distribution des denrées à un coût abordable.
Par ailleurs, il importe que l’agriculture urbaine n’engendre aucune pollution provoquée par l’usage abusif d’engrais chimiques. Aussi, sachant que la culture horticole sur des micro-parcelles dispersées génère souvent des va-et-vient véhiculaires pour l’approvisionnement des matières premières, la production elle-même et la distribution des denrées, il importe que ces déplacements courts ne produise pas une empreinte carbone plus importante que celle des circuits longs.

Centre d’excellence
Imaginez des horticulteur.e.s, des chercheur.e.s, des architectes, des ingénieur.e.s, des technicien.ne.s, des citoyen.ne.s concerné.e.s, des spécialistes du marketing alimentaire, etc., qui unissent leurs efforts et galvanisent leur enthousiasme pour développer une science et des techniques en agriculture urbaine et phytoremédiation.
Imaginez un bâtiment de deux niveaux qui loge des laboratoires, des aires de démonstration, un incubateur industriel, des espaces de rencontres et d’éducation, des bureaux, etc. Il est construit selon les normes LEED de développement durable. Au rez de chaussée, on trouve l’accueil du public à la fois au Parc Nature et au centre, une aire d’exposition, des aires de vulgarisation et de sensibilisation, des salles de réunion pour accueillir des groupes, des scientifiques ou des écoliers, les bureaux d’associations citoyen­nes impliquées dans le projet et un café/casse-croute. L’étage loge des laboratoires, les bureaux des chercheurs et techniciens résidents, des salles de cours et de réunion. Sur le toit du bâtiment, il y a des serres expérimentales. Le bâtiment est situé à l’orée du Parc Nature, par exemple le long de la rue Hochelaga, ou encore le long de la rue Notre-Dame. C’est un bâtiment tout en longueur, relativement étroit, qui sert aussi de portail au Parc Nature.
À proximité immédiate du centre, on aménage des potagers et des jardins expérimentaux. Et au-delà de ces parcelles, c’est le Parc Nature avec sa forêt boréale revitalisée, sa flore dépolluante, ses buissons, ses arbustes, ses fleurs sauvages, son ruisseau regénéré et ses sentiers pédestres.

Mission
La mission du Centre d’excellence est triple. D’abord, en collaboration avec les universités, les cégeps, les institutions et les industries qui œuvrent en agriculture, elle est de déve­lopper l’expertise de ce domaine, l’horticulture, l’architecture et l’ingénierie pour aména­ger les toits et construire les serres ; toujours au sein de la première mission, on propose de développer un véhicule électrique au service des implantations ; la deuxième mission est d’accompagner la mise en œuvre sur une grande échelle de projets d’agriculture urbaine ; et troisièmement, elle est de sensibiliser la population sur la nécessité d’implanter l’agriculture urbaine à Montréal et décontaminer les friches par la phytoremédiation.
Le centre offre un appui technique à tous ceux qui veulent implanter des projets d’agriculture urbaine ou de phytoremédiation à Montréal.

Programme
Le centre mène des activités dans sept axes d’excellence, à savoir :

  1. Développer des techniques horticoles adaptées aux conditions climatologiques de Montréal ; ces techniques s’appliquent à la culture en serre et à celle en pleine terre.
  2. Développer ou améliorer l’architecture, l’ingénierie et les sciences de la gestion pour la construction et la bonne administration de serres autant sur la toiture de grandes surfaces que sur celle, plus petite, de résidences.
  3. Développer et promouvoir les techniques de phytoremédiation.
  4. Développer un petit véhicule électrique au service des jardins ou des serres ; accompagner sa construction et sa vente par une industrie québécoise.
  5. Développer l’expertise en marketing et en commercialisation des fruits et légumes produits sur les parcelles ou dans les serres montréalaises ; fournir les ressources humaines pour l’élaboration de plans d’affaire.
  6. Assurer la planification stratégique de l’agriculture urbaine scientifique sur une grande échelle, solutionner les problèmes juridiques reliés à la mise en œuvre d’une telle stratégie écologique.
  7. Faire la promotion de l’agriculture écologique afin de nourrir les montréalais et contrer le dérèglement climatique.

Dans les cinq premier programmes, il y a des activités de recherche, des expériences en laboratoire, des projets expérimentaux ou de démonstration, des formations d’experts et des activités de sensibilisation du grand public.

Partenariat
Le Centre d’excellence en agriculture urbaine et en phytoremédiation travaille en symbiose avec les universités, les industries, les institutions concernées et les cégeps intéressés. Par exemple, le centre accueille des chercheurs universitaires qui souhaitent poursuivre des expériences en laboratoire, peut élaborer des projets pilotes avec des industries, peut offrir des stages à des étudiants des universités ou des cégeps, peut accueillir des écoliers ou des citoyen.ne.s à des journées de sensibilisation, ou peut financer ou accompagner des initiatives citoyennes.
Voici quelques exemples d’éventuels partenaires du centre : les ministères de l’Agriculture du Canada et du Québec, la Ville de Montréal avec ses 8500 jardins communautaires, les Facultés d’agriculture du Québec, les Écoles d’architecture et d’ingénierie, les programmes PAUSE (Production agricole urbaine soutenable et écologique) et SAUFA (Société d’agriculture urbaine de la Faculté de l’aménagement) de l’Université de Montréal, le Laboratoire sur l’agriculture urbaine de l’Institut des sciences de l’environnement de l’UQAM, le Jardin botanique de Montréal, l’Institut national d’agriculture biologique du Cégep de Victoriaville, de nombreuses industries qui construisent et installent des serres industrielles et résidentielles, les architectes du paysage, les horticulteurs, les fermes Lufa, Dauphinais, Bourgeon et beaucoup d’autres, l’UPA, l’Union paysanne et autres regroupements agricoles, la grande distribution alimentaire, le Conseil national de recherche, l’Association humaniste du Québec …

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[1] Dans le quadrilatère formé des rues Notre-Dame, Dickson, Hochelaga et Viau, dans l’arrondissement Mercier-Hochelaga-Maisonneuve.

[2] Par exemple, les serres des Fermes Lufa

[3] Quand nous disons ‘des lieux de production maraichère partout sur l’île de Montréal’, on aura compris que nous n’excluons nullement une implantation similaire dans toutes les villes du Québec, du Canada, du monde.

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