PRÉSENCE DE LUMIÈRES

Pour aller au delà de l’indignation

Les indignés

Les indignés

Depuis peu, monsieur Antoine Robitaille signe une nouvelle chronique au Devoir intitulée (si je comprends bien!) Les idées en l’ère. Antoine Robitaille est un excellent journaliste. Je ne le connais pas personnellement mais à l’entendre tous les jours converser à la radio avec Benoît Dutrizac, il me donne l’impression d’être un honnête homme. Malgré le cynisme ambiant, il continue de s’indigner.
Justement, l’un de ses premiers textes concerne ‘l’indignation’. Cette année, écrit-il, l’indignation est à la mode. ‘Indignez-vous!’, clame-t-il dans le titre. ‘Oui, mais après?’ lance-t-il du même souffle. À la fin de sa chronique, il cite Stéphane Hessel, ce vieux monsieur qui a vendu plus de deux millions d’exemplaires de sa plaquette Indignez-vous : « . . . l’indignation ne peut être que le commencement d’un travail à faire.» Ça va de soi.
Antoine Robitaille demande à ses lecteurs de communiquer avec lui : le fais aujourd’hui.

Depuis plus deux ans, sur ce site, j’ai proposé des solutions pour nous extirper du marasme actuel. Je les répète :

Après les mouvements d’indignation, les parlementaires de toutes les démocraties de la planète, les gouvernements des pays non-démocratiques mais qui font affaires avec les démocraties ou qui bénéficient de leurs largesses, enfin tous ceux qui nous dirigent doivent mettre en œuvre les mesures suivantes :

Pour éponger les dettes souveraines, il faut prendre l’argent là où il se trouve; en même temps, il faut se donner des règles contraignantes pour éviter qu’un tel enlisement ne se reproduise. À savoir :
— réduire de 20% les budgets militaires de la planète;
— instituer la taxe Tobin sur toutes les transactions financières (pour commencer, disons à un taux 1% du montant impliqué);
— vider les paradis fiscaux;
— colmater les évasions fiscales érigées en système; éliminer les exemptions fiscales qui ne sont que des privilèges de certains groupes.
Avec les revenus découlant de ces mesures, on réduira rapidement la dette à un niveau acceptable.

Pour atténuer la crise financière, il faut :
— réglementer les marchés financiers et les bourses de la planète, y compris les transactions interbancaires de gré à gré, afin de faciliter l’investissement et contrecarrer la spéculation;
— cela implique l’élimination de tous les produits financiers exclusivement spéculatifs (produits dérivés, papiers commerciaux, titres financiers, swaps, etc.) et celle de toutes les pratiques boursières (mutualisation des risques, daytrading, flashtrading, etc.) exclusivement spéculatives et qui ne contribuent en rien à l’économie réelle;
— interdire des hedge funds et autres fonds spéculatifs, et rediriger les capitaux ainsi libérés vers des projets de l’économie réelle;
— interdire sur toute la planète la spéculation sur les denrées;
— interdire sur toute la planète la spéculation sur les devises;
— encadrer le fonctionnement des bourses et autres marchés financiers pour rendre pratiquement impossibles les comportements erratiques auxquels on assiste présentement; l’économie est une affaire trop grave, affecte trop de gens pour la laisser sous le contrôle de spéculateurs pathologiquement cupides et totalement irresponsables;
— éliminer les actuelles agences de notations (qui sont systématiquement en conflit d’intérêt) et les remplacer par des agences contrôlées par des organismes internationaux (par exemple, le G-20 ou le FMI); publier les analyses menant à la notation; établir des critères différents pour apprécier le risque provenant des emprunts de pays par rapport à celui des entreprises privées;
— interdire aux banques de spéculer;
— contraindre les banques d’investir dans l’économie réelle, notamment dans les PME et l’agriculture;
— instituer une réglementation contraignante et sévère du monde financier afin de rendre les banquiers, les traders, les gestionnaires de fonds, etc. imputables devant la population; par exemple, le gestionnaire d’un fonds de pension qui, par son incurie, fait perdre, disons, 20 milliard $ doit être condamné à une peine sévère et non récompenser par un généreux bonus;
— ramener la rémunération des grands dirigeants d’entreprise et des banquiers, courtiers, etc. à des niveaux raisonnables (par exemple, le PDG d’une banque ne pourrait gagner plus que dix fois le salaire moyen de son entreprise);
— éliminer les stock-options;
— éliminer les bonus des traders et des autres spéculateurs;
— modifier de fond en comble les lois régissant les grandes entreprises commerciales pour donner plus d’importance aux clients, aux employés, à l’environnement et à la qualité des produits et services, et moins d’importance aux actionnaires et aux dirigeants; ainsi, par exemple, les profits générés par suite de licenciements ou de délocalisations seraient lourdement taxés.

Cette liste de mesures n’est pas complète. On pourrait en ajouter plusieurs autres concernant notamment l’instauration de la laïcité, la réforme des droits et des responsabilités individuelles et collectives, l’assainissement des mœurs politiques, la protection de l’environnement, la rationalisation du milieu bâti, le harnachement de l’énergie responsable, l’éradication de la pauvreté endémique et la valorisation de l’agriculture.
Cette liste ne constitue pas une doctrine économique nouvelle; cela viendra plus tard. Pour le moment, elle ne contient que des mesures pour déraciner les abus les plus odieux d’un capitalisme devenu dément.
Bien sûr, chacune de ces mesures mérite un développement plus complet, et doit s’appuyer un argumentaire plus étoffé.
Les médias doivent relayer dans l’opinion les solutions à la crise actuelle, non seulement celles esquissées ici, mais beaucoup d’autres.