PRÉSENCE DE LUMIÈRES

Le Gouvernement du Québec décerne le Prix Guy-Rocher de la laïcité au MLQ

Hier, suite à une décision d’un jury indépendant, le Gouvernement du Québec a décerné le Prix Guy-Rocher de la laïcité 2021 au Mouvement Laïque Québécois. Ce prix récompense quarante années d’un militantisme à la fois soutenu, rigoureux et respectueux de nos valeurs démocratiques et de nos idéaux d’humanisme. En tant que membre du Conseil national du MLQ, j’aimerais profiter de cette extraordinaire occasion pour souligner le travail désintéressé de milliers de militants à la cause de la laïcité. Notre président, Daniel Baril, et notre vice-présidente, Lucie Jobin, ont reçu le prix des mains du ministre Simon Jolin-Barrette, responsable de la laïcité, en présence de monsieur Maka Kotto, ancien député et membre du jury.

Voici le Communiqué du Gouvernement québécois qui annonce l’événement:

QUÉBEC, le 16 juin 2021 /CNW Telbec/ – Afin de saluer la contribution exceptionnelle d’une personne ou d’un organisme en faveur de la laïcité, le ministre responsable de la Laïcité, M. Simon Jolin-Barrette, a remis, aujourd’hui, le Prix de la laïcité Guy-Rocher lors d’une cérémonie à l’auditorium de la Grande Bibliothèque de BAnQ, à Montréal. Pour cette première année, l’honneur a été décerné au Mouvement laïque québécois. Fondé en 1981, le Mouvement laïque québécois est fermement engagé à défendre la laïcité et la liberté de conscience. Il milite en faveur d’un aménagement de la vie en société qui permet aux personnes croyantes de toutes les confessions et aux personnes non croyantes de vivre ensemble dans le respect, la liberté et l’égalité de chaque citoyen et citoyenne devant la loi. En 40 ans d’existence, le Mouvement laïque québécois a été à l’avant-plan des avancées qu’a connues le Québec en matière de laïcité, que ce soit pour la déconfessionnalisation du système scolaire, le respect de la liberté de conscience notamment lors des conseils de ville, ou l’inscription, dans une loi, du principe de laïcité. En plus de recevoir un certificat signé par le ministre, le lauréat s’est vu décerner une oeuvre de la peintre Mégane Fortin. Originaire de Stoneham-et-Tewkesbury, cette jeune artiste de 13 ans pratique la peinture abstraite depuis 2015. Ses oeuvres sont notamment exposées de façon permanente à Montréal et en France. On peut voir un aperçu de son talent sur son site Web. Remis par le ministre responsable de la Laïcité pour promouvoir la laïcité de l’État, le Prix de la laïcité Guy-Rocher s’inscrit en continuité avec le projet de loi du même nom, adopté le 16 juin 2019. Le choix du lauréat a été effectué à la suite de l’analyse des candidatures reçues par un comité d’évaluation composé de quatre personnes et spécialement constitué pour l’occasion. Citations : « Le Mouvement laïque québécois est l’un des groupes les plus engagés, au Québec, pour la défense et la promotion de la laïcité et de la liberté de conscience, et ce, depuis maintenant 40 ans. Ce premier Prix de la laïcité Guy-Rocher lui revient de plein droit. Nous transmettons nos plus sincères félicitations au Mouvement ainsi qu’à ses membres, dont les actions sont source de fierté et de progrès social pour tous les citoyennes et citoyens du Québec. Nous souhaitons que cet honneur leur donne l’élan et la détermination de poursuivre leur travail pour les décennies à venir. » Simon Jolin-Barrette, ministre de la Justice et ministre responsable de la Laïcité « Je le réitère, la laïcité de l’État est au coeur du parcours historique propre à notre nation. Il s’agit d’une valeur qui a guidé notre développement sociétal et démocratique. Au cours des dernières décennies, le Québec a franchi d’importantes étapes en faveur de la laïcité de l’État, et ce, notamment sous l’impulsion du travail acharné de groupes comme le Mouvement laïque québécois. Depuis sa fondation, le Mouvement a grandement contribué à faire progresser les principes de laïcité et de liberté de conscience, au Québec, en étant à l’avant-plan de luttes comme celle de la déconfessionnalisation du système scolaire. L’honneur qui lui est décerné aujourd’hui est pleinement mérité et reconnait l’importance et la valeur de son engagement social en faveur du Québec d’hier, d’aujourd’hui et de demain. » Guy Rocher, professeur émérite de sociologie Composition du comité de sélection : Mme Ferroudja Si Hadj Mohand, représentante d’un organisme ou d’un regroupement qui soutient la laïcité; M. Maka Kotto, représentant de la société civile ou du domaine de l’enseignement collégial et universitaire; Mme Marianne Bonnard, représentante du ministère du Conseil exécutif; Mme Melisa Lafleur-Chumacero, représentante du Secrétariat à l’accès à l’information et à la réforme des institutions démocratiques. Lien pertinent : https://www.quebec.ca/gouv/reconnaissance-prix/prix-laicite-guy-rocher SOURCE Cabinet du ministre de la Justice et procureur général du Québec

Voici l’allocution du président du MLQ, Monsieur Daniel Baril, présentée lors de cette cérémonie :

Monsieur le ministre Simon Jolin-Barrette
Mesdames Messieurs du jury
Chers invité-e-s

Merci au ministre Jolin-Barrette d’abord et avant tout pour avoir créé ce prix de la laïcité. Cette heureuse initiative nous parait révéler une volonté de la part du gouvernement de ne pas laisser la laïcité sous le boisseau, de ne pas baisser l’échine et de la défendre face aux attaques vicieuses dont elle est la cible présentement. Nous en sommes ravis.

Merci à Monsieur Guy Rocher, avec qui j’ai eu l’honneur et le plaisir de rédiger la Déclaration pour un Québec laïque et pluraliste, sur laquelle a été fondé le collectif Les intellectuels pour la laïcité, merci pour avoir accepté de léguer votre nom à ce prix.

Merci à Mme Marie-Anne Alepin, présidente de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, et à Mme Micheline Labelle pour avoir parrainé et recommandé la candidature du Mouvement laïque québécois. Merci finalement au jury, qu’on ne pourra certes pas accuser de ne pas refléter la diversité, merci pour avoir retenu la candidature du Mouvement laïque pour ce tout premier prix de la laïcité.

Le Mouvement laïque québécois a été créé il y a maintenant 40 ans expressément pour réclamer la reconnaissance juridique de la laïcité de l’État au Québec. C’est la seule association de la société civile créée spécifiquement à cette fin. Nous voyons dans l’attribution du prix Guy-Rocher une juste reconnaissance du travail accompli pendant toutes ces années par tous ceux et celles qui se sont succédés à la tête du Mouvement laïque pour faire de cet objectif démocratique, républicain et antiraciste une réalité maintenant concrétisée avec la loi 21.

Il serait trop long de nommer toutes ces personnes mais je tiens à souligner le travail remarquable de quelques-uns de ses représentants sans qui le MLQ ne serait pas ce qu’il a été jusqu’à maintenant. Tout d’abord Monsieur Henri Laberge, ami et compagnon de route de Guy Rocher avec qui il a œuvré à la rédaction de la Charte de la langue française, et dont la réflexion a été d’un apport théorique et philosophique inestimable au sein du MLQ où il a été tour à tour conseiller puis président entre 1993 et 2005.

Je tiens également à souligner la contribution sans relâche de Me Luc Alarie, fidèle conseiller juridique du MLQ depuis sa fondation, et qui a obtenu une éclatante victoire en Cour suprême du Canada en faisant reconnaitre mieux que jamais la neutralité religieuse de l’État. Ce combat, il continue de le mener dans la présente défense de la Loi sur la laïcité de l’État dont certains des fondements – entre autres la « neutralité réelle et apparente » prennent appui dans l’arrêt unanime de la Cour suprême MLQ contre Saguenay.

Également à souligner, la détermination de Mme Lucie Jobin, actuelle vice-présidente du MLQ et qui a tenu la barre de la présidence pendant les 10 dernières années. À ces personnes, je tiens à rendre les hommages qui leur sont dus. L’honneur de ce prix de la laïcité rejaillit sur tous ceux qui ont porté l’épaule à la roue et qui ont fait rayonner les principes de la laïcité bien au-delà du cercle du Mouvement laïque québécois.

Pendant ces 40 années, nous avons été de toutes les causes où la question de la laïcité était un enjeu en produisant plus d’une trentaine de mémoires liés à autant de projets de lois, commissions parlementaires ou autres commissions publiques. Au premier chef, nos interventions concernant la déconfessionnalisation du système scolaire, bien sûr, mais pas uniquement cet enjeu. Nous sommes intervenus notamment dans la lutte pour le droit à l’avortement aux côtés du Dr Henri Morgentaler, pour le droit au mariage des personnes de même sexe jusqu’en Cour suprême du Canada, sur la place du Québec au sein de la confédération, sur l’érouv à Outremont, et évidement sur les projets de lois 60, 62, 59, 96 et 21, toujours pour demander la laïcité de l’État.

La loi 21 pour laquelle nous nous battons présentement n’est pas l’expression complète et ultime de la laïcité de l’État. Néanmoins, elle est une pièce essentielle qui va jusqu’à créer du droit nouveau en accordant le droit à des institutions publiques laïques. Elle est fondée sur des principes clairs et limpides qui ont toujours été ceux que nous avons mis et que nous continuerons de mettre de l’avant :

  • la séparation de l’État et des religions ;
  • la neutralité religieuse de l’État ;
  • l’égalité de tous les citoyens et citoyennes ;
  • la liberté de conscience et la liberté de religion.

Le plus fondamental de ces principes est celui de la liberté de conscience, les autres étant des corolaires de celui-là.

La reconnaissance de la liberté de conscience conduit en effet à reconnaitre et à protéger la liberté de religion, ce qui nécessite une stricte séparation de l’État et des religions et la subordination des règles religieuses aux lois civiles. Cette séparation assure l’égalité des religions aux yeux de la loi, ce qui proscrit toute règle favorisant l’une ou l’autre des convictions en matière de religion.

La stricte séparation de l’État et des religions exige en outre une « neutralité réelle et apparente » des institutions publiques comme le rappelle la Cour suprême du Canada et comme le prescrit la loi 21.

La laïcité est en fait un mode de gestion de la diversité qui assure l’égalité des droits pour tous. Bien comprise, la laïcité est ainsi un des éléments de lutte au racisme, quoi qu’en disent ses opposants.

Les inégalités déplorées par les opposants à cette laïcité républicaine ne sont pas le fruit de la laïcité ; ces inégalités sont celles des religions entre elles et celles des règles inégales qu’elles créent entre leurs propres adhérents. L’État laïque n’a pas à s’adapter à ces conceptions des relations humaines mais à créer des conditions favorisant l’émancipation et la dignité de tous et de chacun.

La laïcité mise sur les valeurs humanistes universelles qui unifient l’espèce humaine plutôt que sur les particularismes qui divisent les citoyens entre eux et qui sont propices à l’exclusion et aux ghettos sociaux. Ces valeurs, comme l’égalité ethnique, l’égalité des sexes, la liberté de conscience, l’appel à la raison, sont des valeurs issues du siècle des Lumières et elles ne sont pas le propre de l’Occident comme on voudrait parfois nous faire croire. Ce sont des valeurs que l’on retrouve chez tous les peuple, des valeurs qui fondent la dignité, et la laïcité les expriment toutes.

Je sais que vous savez tout ça. Puisse « the rest of Canada  » le comprendre et le faire sien.

Monsieur le ministre, merci infiniment pour cette reconnaissance et ce grand honneur qui est fait au Mouvement laïque québécois.

Daniel Baril, président
Mouvement laïque québécois
16 juin 2021

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